Yellowstone
Le supervolcan du
Yellowstone National Park tremble et se déforme, causant une modification de la
topologie du terrain de manière spectaculaire, selon un rapport du National
Geographic. S'agit-il de signes précurseurs d'une éruption catastrophique ou
d'un simple "ronflement" cyclique ?
Le plus grand
volcan du monde a déjà produit trois éruptions majeures au cours des deux
derniers millions d'années. La première a eu lieu il y a 2,1 millions d'années
: l'éruption a émis tellement de magma que la chambre magmatique s'est
effondrée créant une dépression, la caldeira avec des dimensions
impressionnantes : 80 km de long, 65 km de large et des centaines de mètres de
profondeur. La deuxième éruption s'est produite il y a 1,3 millions d'années et
la troisième il y a 640 000 ans. C'est cette dernière qui a formée la caldeira
actuelle de Yellowstone qui s'étend sur 40 à 60 km[1].
Depuis, environ
30 petites éruptions y compris une datée d'il y a seulement 70 000 ans, ont
rempli la caldeira de lave et de cendres, et ont construit le paysage
relativement plat que nous connaissons aujourd'hui.
Source d'eau chaude.
Yellowstone National Park, Wyoming - USA © Sylvain Magdelaine
Yellowstone : une
chambre magmatique colossale
Le volcan du
Yellowstone se caractérise par une imposante chambre magmatique souterraine de
plus de 70 kilomètres de large, et d'une hauteur de plus de 10 kilomètres, la
plus grosse jamais détectée. À l'intérieur bouillonne du magma à une
température de 1 500 °C. Cependant, selon une étude rendue publique fin octobre
2013, les dimensions de la gigantesque chambre magmatique pourraient avoir été
sous-estimées. En effet, Robert Smith de l'université de l'Utah a indiqué que
la chambre magmatique résidant sous le parc de Yellowstone mesurerait 90 km de
long pour 20 km de large. Par ailleurs, elle se situerait entre 2 km et 15 km
de profondeur sous la caldeira, selon les endroits.
Les pressions du
magma déforment le sol
Alors que
l'épaisseur de la croûte terrestre est d'environ 30 km, à Yellowstone elle
n'est que de 7 à 10 kilomètres. Ce qui fait que la pression exercée par la
chambre magmatique se traduit par des déformations en surface. Ainsi, à partir
de 2004, les scientifiques ont vu le sol au-dessus de la caldeira s'élever de 7
centimètres par an. Bien que ce taux ait ralenti entre 2007 et 2010 à un
centimètre par an ou moins, depuis le début de ce gonflement, le sol s'est
soulevé de plus de 25 centimètres à plusieurs endroits. « Il s'agit d'une
élévation extraordinaire, car il couvre une grande surface et les taux sont
très élevés », a déclaré Bob Smith, un expert de longue date dans le volcanisme
de Yellowstone de l'Université d'Utah. Les scientifiques pensent qu'un
réservoir de magma gonfle, 7 à 10 kilomètres sous la surface de la terre, ce
qui entraîne ce soulèvement. Heureusement, l'élévation ne semble pas annoncer
une catastrophe imminente, a déclaré Bob Smith : « Au début nous pensions à une
éruption ». « Mais une fois que nous avons vu que le magma était à une
profondeur de dix kilomètres, nous n'avons pas été si préoccupés. S'il se
situait à une profondeur de deux ou trois kilomètres, là, nous aurions été
beaucoup plus vigilants ». Les études offrent de précieux indices sur ce qui se
passe dans la tuyauterie souterraine du volcan, ce qui pourrait éventuellement
aider les scientifiques à prédire quand aura lieu la prochaine éruption volcanique
à Yellowstone.
Les respirations
insondables de Yellowstone
Smith et ses
collègues de US Geological Survey (USGS) et de l'observatoire du volcan de
Yellowstone ont cartographié les soubresauts de la caldeira à l'aide d'outils
tels que les systèmes de positionnement GPS et d'interférométrie radar (InSAR),
qui mesurent la déformation du sol. La déformation du sol suggère que le magma
est en mouvement vers la surface, signe précurseur d'une éruption. Les flancs
du mont St-Helene, par exemple, ont gonflé de façon spectaculaire dans les mois
précédents l'explosion de 1980. Ce fut également le cas avant l'éruption plus
modeste de l'Eyjafjallajökull en avril 2010 : son flanc avait enflé de plus de
15 centimètres environ, étant donné que le magma avait coulé dans les chambres
étroites sous la montagne.
Mais il existe
aussi de nombreux contre-exemples, y compris dans le cas du supervolcan de
Yellowstone, où le sol enfle sans que cela soit suivi par une éruption. Selon
la théorie actuelle, le réservoir magmatique de Yellowstone est alimenté par un
panache de roches chaudes provenant du manteau terrestre. Lorsque la quantité
de magma qui afflue dans la chambre augmente, le réservoir se gonfle comme un
poumon et la surface s'élève. Lors du soulèvement des dernières années, les
modèles indiquent que le réservoir s'est rempli d'environ 1 million de mètres
cube de magma par an. Lorsque cet afflux ralentit, en théorie, le magma se
déplace horizontalement pour se solidifier en refroidissant, ce qui fait
redescendre le niveau de la surface terrestre.
"Sur la base
de preuves géologiques, Yellowstone a probablement vu un cycle continu
d'élévation puis de régression au cours des 15 000 dernières années, et ce
cycle continuera probablement", a déclaré Bob Smith. Les enquêtes montrent,
par exemple, que la caldeira a augmenté d'environ 18 centimètres entre 1976 et
1984 avant de redescendre d'environ 14 centimètres au cours de la décennie
suivante. Il ajoute "ces caldeiras ont tendance à monter et descendre,
mais de temps en temps, elles créent des explosions hydrothermales, des
tremblements de terre, ou des éruptions volcaniques".
Les chercheurs
estiment que 10 à 30% du magma présent sous Yellowstone est à l'état liquide,
c'est donc encore insuffisant pour déclencher une éruption majeure (il en
faudrait au moins 50%). Mais des poches de magma en fusion dans la chambre
pourraient quand même causer des éruptions plusieurs fois plus fortes que celle
de 1980 au Mont St Helens (Etat de Washington), prévient Jacob Lowenstern, qui
dirige l'Observatoire de Yellowstone pour le compte de l'USGS de Menlo Park, en
Californie.
De la difficulté
de prévoir une éruption de Yellowstone
Prévoir
l'imminence d'une éruption volcanique reste extrêmement difficile, en partie
parce que de nombreuses données font encore défaut dans le cas de Yellowstone.
De plus, les enregistrements en continu de l'activité de Yellowstone ne sont
disponibles que depuis les années 1970, ce qui est insignifiant à l'échelle des
temps géologiques et ne permet donc pas de tirer de conclusions sur les
observations effectuées. De toute évidence, il y a encore du magma sous
Yellowstone souligne Dan Dzurisin, un expert de Yellowstone.
Ceci se manifeste
par l'activité hydrothermale continue juste sous la surface : geysers (il y en
a plus de 500), sources d'eau chaude (plus de 10 000), boues chaudes,
fumerolles qui constituent une attraction pour de nombreux touristes. Ce
large système hydrothermal pourrait aussi jouer un rôle dans les déformations
du sol, mais il est difficile de savoir dans quelle mesure.
Quelque 3000
tremblements de terre secouent chaque année Yellowstone. Par exemple, entre le
26 décembre 2008 et le 8 janvier 2009, environ 900 séismes se sont produits
dans une zone localisée autour du lac Yellowstone. Cette concentration de
secousses pourrait avoir relâché la pression du magma dans le réservoir en
permettant aux fluides de s'échapper ralentissant du coup l'élévation du sol,
comme l'indique Smith de l'Université de l'Utah.
Ces séismes
devraient fournir de précieux indices sur les relations entre la chambre
magmatique et les déformations du sol. Au final, l'histoire géologique de
Yellowstone et les causes des déformations enregistrées sont devenues de plus
en plus complexes avec l'évolution des techniques disponibles pour les étudier.
Les principales
conséquences d'une éruption de Yellowstone
Une éruption à Yellowstone serait une
catastrophe majeure. Selon les experts, un tel événement causerait des dégâts
gigantesques, équivalant à environ 1 000 fois celle du mont Saint Helens en
1980. Les cendres émises par le volcan détruiraient toute végétation jusqu'à
1600 km du cratère : deux tiers des États-Unis et un tiers du Canada
deviendraient inhabitables. Les émanations toxiques du volcan rendraient l'air
irrespirable... Enfin, une telle éruption aurait des conséquences sur
l'ensemble du climat planétaire pendant des années.
Notes Ces
éruptions ont été respectivement 2 500, 280 et 1 000 fois plus puissantes que
celle du mont St-Helens de 1980.
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